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Du vin pour les enfants qui soulent !

Du vin pour les enfants qui soulent !

Du vin pour les enfants qui soulent !

Un vieux problème scolaire

Les enfants turbulents ou inattentifs ont été, dès ses débuts, un des sujets récurrents de la littérature enfantine, mais c’est aussi un sujet sérieusement traité par les médecins d’autant plus que se développe l’instruction primaire tout au long du XIXe siècle. Avec l’éducation obligatoire, le problème des enfants qui ne « suivent » pas en classe devient un sujet important, qui aboutira à l’établissement des premiers tests psychométriques au début du XXe siècle. Le problème de l’attention des écoliers est aussi largement pris en compte par les pédagogues qui donnent de multiples conseils aux maîtres pour stimuler l’intérêt des élèves, dont des mesures « d’hygiène » au premier rang desquelles la dépense physique (récréation, éducation physique…).

Le développement de la pharmacie

Le XIXe siècle voit également le développement progressif de nouveaux médicaments avec l’essor de la chimie. Jusque là, le pharmacien n’était destiné qu’à fabriquer artisanalement les préparations inscrites dans les codex, mais certains se mettent à proposer des médicament nouveaux, d’abord nouveaux sels d’éléments déjà connus (fer, calcium), puis des préparations de molécules naturelles nouvellement identifiées, enfin de nouvelles molécules synthétiques, constituant les « spécialités pharmaceutiques », dont le cadre juridique ne sera établi que bien plus tard en France (1941). C’est ainsi que sont proposées une multitude de potions diverses, souvent copiées les unes sur les autres, dont les indications sont assez larges et l’efficacité attestée par la seule observation de cas particuliers par un médecin plus ou moins renommé, qui transmet ses observations à ses confrères, généralement via l’académie de Médecine.

Parmi tous ces produits, très tôt on retrouve des médications censées redonner de la vigueur au corps, mais aussi au système nerveux (toniques « nervins »). La distinction entre l’action sur la physiologie du corps et directement sur le système nerveux, est d’ailleurs assez floue au début, puis petit-à-petit se dégage la notion de fortifiant pour le corps et de tonique pour les fonctions « nerveuses » (nous dirions maintenant cérébrales). Par exemple le fer qui, nous le savons maintenant, combat la faiblesse due à l’anémie est aussi indiqué à l’époque dans bien d’autres états où il existe une faiblesse physique ou « nerveuse » (sans que la différence soit encore nette entre ce qui est d’origine neurologique ou psychique). Il en va de même de la célèbre huile de foie de morue, dont l’action antirachitique est reconnue depuis 1823, mais qui devient une panacée proposée dans d’autres états voisins de fatigue et de dénutrition, évidemment là sans grande efficacité.

Dans la deuxième moité du siècle, se développe la consommation de vins et de spiritueux en particulier à base d’extraits de plante dont par exemple le quinquina (l’arbre dont est extrait la quinine). Plus tard ces produits d’abord présentés comme médicaments, verront progressivement ce que nous appelons aujourd’hui leurs « allégations de santé » passer au second plan de leur utilisation comme apéritifs ou digestifs (ces appellations étant la survivance de ces allégations).

Des vins avant Evin

Lettre de Léon XIII recommandant le vin Mariani

En 1863, Ange Mariani, un pharmacien parisien d’origine corse, prépare un vin tonique en faisant macérer des feuilles de coca dans du vin de Bordeaux. Le vin Mariani connaît un succès important, pour toutes sortes de maux. Avant la guerre 14-18, il vend annuellement près de 10 millions de bouteilles, autant que de nos jours les bouteilles de Martini en France.

Son succès est entretenu par une publicité massive à base de recommandations de personnes illustres (plus de 1000 !) jusqu’au pape Léon XIII (pour en savoir plus sur le vin Mariani: www.vinmariani.fr)

Coca-Kola Chapel

Changement d’époque : imaginerions-nous aujourd’hui le pape François sur une publicité pour un célèbre soda ? Cette remarque n’est pas innocente ; le succès du vin Mariani fait des émules à une époque où la propriété industrielle est encore aléatoire. Très vite Mariani est copié par des Français mais aussi des étrangers. C’est ainsi qu’en 1885 John S. Pemberton, un pharmacien d’Atlanta, crée une copie des copies sous le nom de French Coca Wine qui aura beaucoup de succès. En raison de la prohibition locale des boissons alcoolisées, il est obligé de créer dès 1886 une version non alcoolisée qui deviendra le Coca-Cola, mais notons que le nom rappelle étrangement celle du vin tonique Chapel.

Attention à l’école !

Pendant ce temps en France, Mariani continue sa publicité et étend son utilisation, jusqu’aux enfants des écoles d’où cette délicieuse carte postale montrant des enfants d’une école du XXe arrondissement de Paris trinquer avec leur maîtresse ! Heureuse époque où l’on pensait améliorer l’attention des élèves avec un petit verre de vin de coca.

Mais ne rions pas trop : la viennoiserie destinée à lutter contre le petit creux de 10h a été en vogue pendant une génération, puis a été ensuite proscrite en raison de la lutte contre l’obésité, mais pourrait faire un retour pour cause de petit-déjeuner bâclé.

Les modes changent, les problèmes restent, ne cherche-t-on pas toujours les remèdes miracles ?

Après un siècle de considération sur le maintien de l’attention des élèves, nous vivons de nos jours une drôle de valse des rythmes scolaires, à trois temps (droite, gauche, centre), sur quatre jours, six ministres (au moins !) et 36.000 communes !

Et malgré cette multiplication de solutions, il n’est pas encore tout à fait acquis dans l’esprit de tous qu’il puisse y avoir des différences d’attention importantes entre les élèves eux-mêmes : le problème du TDAH (trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) ne commence que tout juste a être pris officiellement en compte en France.

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